lundi 30 septembre 2013

Un chiot Braque Allemand CRAINTIF dans la rue


ITOU est un chiot Braque Allemand mâle de 6 mois. Il a été adopté dans un élevage rural à l'age de 5 mois.

Il est présenté en consultation car, depuis son acquisition  , il présente des réactions de peur dès qu'il est dans la rue. Ces réactions sont exacerbées lorsque ITOU croise un inconnu dans la rue: dès l'adoption, il tentait de s'enfuir, mais désormais, il se rapproche de son maître en tremblant, ce qui représente un progrès.
ITOU est très calme à la maison, joueur et avenant avec ses maitres, mais dès qu'un invité est présent, il manifeste de la crainte et tente de se soustraire.

Les maîtres de ITOU vivent en couple avec leur enfant de 15 ans dans un grand appartement parisien dans un quartier très animé. Il est sorti 4 fois par jour dans une fois le midi par une promeneur. 2 fois par semaine, la promenade a lieu au Bois de Vincennes.
 POINT CAPITAL: lors de ces promenades, ITOU est très à l'aise, il recherche les interactions avec ses congénères et ainsi se laisse approcher par les autres propriétaires de chiens. Nous nous servirons des capacités sociales de ITOU dans son plan de traitement.

Lors de son arrivée en consultation, on constate que ITOU présente de nombreuses réactions de peur lors de mouvements brusques. Il est également très sensible aux bruits!



 Le motif de consultation : "il a peur de tout", dans la rue et de tous les inconnus. Dans cette 1ere partie, un montage des 1eres minutes de consultation où le chiot (6 mois) arrive dans un endroit inconnu avec un véto inconnu. Noter les nombreuses réactions de PEUR qui laissent place progressivement à des comportements exploratoires.







Après quelques minutes, pendant lesquelles je laisse ITOU appréhender cet environnement sans interagir avec lui, il est plus détendu, mais n'initie pas le contact avec l'inconnu. Avant de faire un examen clinique, il faut le faire basculer dans un état émotionnel positif.... ça tombe bien, ITOU est GOURMAND!!




 

Après l'entretien, ce chiot (6 mois) a eu le temps d'explorer ce nouvel environnement. Pour évaluer ses capacités d'apprentissage dans une situation nouvelle, il faut initier des interactions. En tant qu' "étranger" pour le chiot, rien de tel que des friandises pour réduire les distances d'interactions.








Par le jeux et les récompenses, ITOU m'autorise les premières manipulations physiques sans réaction craintives. L'examen clinique se fera selon le même principe, sans le monter sur la table de consultation. Il ne révèlera aucune anomalie, et en particulier aucun trouble de la vision ou de l'audition.


PLAN D'ACTION:

Comme ITOU est gourmand et qu'il arrive à se concentrer sur une tâche précise (son coté Braque?) nous allons utiliser travail et le conditionnement pour entreprendre sa désensibilisation au milieu extérieur et aux inconnus.



ITOU est testé au CLICKER pendant la consultation: il propose de lui même assez rapidement de nouveaux comportements. Les maîtres semblent intéressés par cette approche.


Une fois bien focalisé sur le Clicker, on renouvelle ces exercices dans la cours du cabinet. ITOU est stressé et alterne de nouveau exploration / réactions de peur (bruits, passants derrière la grille). Pendant cette phase, ses maîtres ont pour consigne de ne pas le rassurer. Après quelques minute, il arrive de nouveau à se focaliser sur les exercices de Clicker et ignore les stimuli de la rue.



En présence d'un chien co-éducateur, ITOU est focalisé sur les interactions sociales et réagit encore moins à son environnement. Cela nous permettra même de travailler les 2 chiens ensemble à proximité de commerces fréquentés sans réactions de peur.

EN CONCLUSION:

1) Les visiteurs ou même les inconnus dans la rue (maîtres d'autres chiens) devront distribuer des récompenses à ITOU sans pour autant tenter d'interagir avec lui pour le moment.

2) Poursuivre le conditionnement au Clicker à la maison pendant une semaine, puis répéter les exercices dans la rue dans un environnement peu stimulant (milieu contrôlé).

3) Privilégier les promenades en milieu urbain avec des congénères pour entretenir les capacités sociales de ITOU et favorises la FACILITATION SOCIALE qui semble être très motivante pour ITOU.

ON reverra ITOU dans 15 jours pour évaluer ses progrès, et cette fois, promis, je le filme dans la rue avec son copain co-éducateur!


Dr Antoine BOUVRESSE






mardi 24 septembre 2013

Un cas de Pica de Gris du Gabon


Adèle est un perroquet femelle Gris du Gabon de 11 ans.






Elle est amenée en consultation pour picage depuis 6 à 8 mois: elle arrache ses plumes au niveau des pattes, du ventre, et depuis quelques semaines au niveau du bréchet et du dos.





  Adèle a été acheté dans une animalerie à l'âge de 8 mois. Elle est censée avoir été élevée à la maison, mais l'éleveur n'est mentionné dans aucun document. Elle a été extrêmement  craintive pendant les 6 premiers mois de son adoption, refusant systématiquement de sortir de sa cage!



 L'examen clinique ne met pas en évidence de lésions dermatologiques particulières permettant de suspecter une origine infectieuse ou parasitaire pour ces symptômes. Néanmoins, à titre préventif, un traitement anti-parasitaire de l'environnement sera mis en place.

L'observation de Adèle en liberté dans la salle de consultation montre:

           - Des réactions de peurs nombreuses (tremblements, esquives) qui sont fréquentes chez les perroquets
           - Une recherche importante de contact avec ses maitres.
           - Une incapacité à explorer son environnement qui crée une véritable frustration: pendant de nombreuses minutes, elle se tient au bord de la table, esquisse des mouvements d'ailes sans pourvoir se déplacer. En effet, les plumes de ses ailes sont coupées ce qui l'empêche de voler.




           - Après avoir pu rejoindre sa maitresse en étant passé par le sol (ce qui est une position particulièrement inconfortable pour un "oiseau-proie" dans un environnement inconnu), elle commence à se toiletter et s'arracher des plumes . 




Conclusion: Adèle est anxieuse et elle le manifeste par des comportements de maintenance exacerbés. Les principales causes de cet état anxieux sont vraisemblablement:

                  - Un environnement de développement pauvre et / ou inadapté
                  - L'incapacité de pouvoir explorer son environnement et / ou se placer spontanément en hauteur car elle ne peut pas voler.
                  - Sa maitresse, son "être d'attachement", a repris ses études, modifiant totalement son emploi du temps et le budget-temps qu'elle consacrait à Adèle.


Le traitement consiste en un enrichissement de son environnement et de ses activités physiques et mentales:

       1) Adèle doit apprendre à voler pour trouver de l'autonomie et de la sécurité dans son environnement. Ne plus couper les plumes des ailes, augmenter sa ration alimentaire, car elle devra se muscler pour parvenir à revoler. La récompenser lorsqu'elle bat des ailes, et la faire voler d'un de ses maître à l'autre avec des friandises. Ces exercices lui procureront également une dépense physique et mentale.

On a observé en consultation que le fait de ne pas pouvoir rejoindre sa maitresse engendrait une grande frustration. Le PICA est déclenché dès qu'elle parvient à rejoindre l'épaule de sa maitresse qui l'apaise. Si elle peut s'y rendre facilement et de manière autonome, on peut supposer qu'elle n'aura plus se stress à "évacuer" par le toilettage excessif.
   



 2) La cage est spacieuse et bien aménagée, mais il faut rentre plus complexe la distribution alimentaires; supprimer les gamelles et proposer des jeux à tiroir ou des distributeurs alimentaires tournants.


Cela permettra d'augmenter le budget temps de la prise alimentaire et de "combler son besoin" de fourragement! Chercher, trier, gouter, jeter, cela fait partie du comportement normal d'un perroquet, beaucoup plus que d'avoir une très grande quantité de nourriture à disposition en permanence.






 3) Motiver et  augmenter ses dépenses  intellectuelles: les perroquets ont des capacités d'apprentissages immenses, il faut là aussi "les combler".
Par exemple commencer par des exercices de discrimination visuelle. Les récompenses doivent être données dans un délai très bref (moins de 2 secondes) et être consommées assez rapidement pour répéter de nombreuses fois l'exercice. Pour Adèle, ce sera un morceau de banane qu'elle pourra goûter dès qu'elle identifiera la bonne couleur. L'exercice peut être optimisé par l'utilisation de méthode de clicker training.



4) faire prendre à Adèle 1 douche par semaine car elle semble apprécier l'eau mais ne peut se baigner que dans une petite écuelle. Cela permettrait sans doute à Adèle d'effectuer un comportement de toilettage dans un contexte positif et agréable et non dans une situation de stress ou de frustration.

5) Un apport nutritionnel supplémentaire est proposé pour répondre à une activité physique et musculaire croissante: Nutribird P15 extrudés.


Toutes ses mesures ont également pour objectif d'améliorer la qualité et la quantité des activités entre Adèle et ses maîtres.
Adèle sera revue en contrôle dans 2 mois avec plein de vidéo de ses exercices à la maison + des photos de son environnement de vie. Elle devra pouvoir voler dans la salle de consultation!!






dimanche 22 septembre 2013

L'anthropomorphisme (Vulgarisation)




L’anthropomorphisme est le fait de prêter des intentions humaines aux animaux. 

C’est-à-dire que l’on explique un comportement de notre animal comme s’il résonnait comme un humain.
Il y a dans ce raisonnement plusieurs risques d’erreurs :
-          Tout d’abord les facteurs de motivation d’un chien ne sont pas les mêmes que les nôtres … un seul exemple parlant pour illustrer ce propos : regardez ce toutou en train de manger les excréments d’un congénère… nous sommes d’accord : les choses qui nous motivent ne sont pas les mêmes !
-          Après la motivation, c’est l’interprétation qui bien souvent est source d’erreurs : nous ne pouvons faire abstraction de nos sentiments (jalousie, vengeance..), or les animaux… n’en ont pas !!

En tout état de cause, pour éviter les erreurs liées à l’anthropomorphisme, il faut appliquer le célèbre « Canon de Morgan » ou principe de parcimonie. Le principe est simple : Il ne faut pas interpréter un comportement par des capacités supérieures (comme les sentiments) lorsqu’il peut être expliqué par des mécanismes basiques (comme les apprentissages).

Un exemple : Pourquoi mon chien veut-il monter sur le canapé dès que je quitte la place ?

Réponse anthropomorphique : il se met en hauteur car il veut me montrer qu’il est la maitre ! Alors on prête des sentiments humains (jalousie, orgueil) qui demandent des capacités cérébrales et de conscience de Soi que les animaux n’ont pas.
Le principe de parcimonie nous dit qu’il vaut mieux interpréter ce comportement comme une simple recherche de confort : un coussin moelleux, chauffé, à proximité de son maitre !! On évite ainsi beaucoup d’interprétations erronées.

Mon chien grogne quand je le fais descendre du canapé !

Il est dominant et veut me soumettre ? Ou alors il est dans une situation de confort qu’il ne veut pas perdre (défense de ressources) et a appris qu’en grognant…on lui laissait la place… Dans ce cas, les apprentissages (à l’encontre du maitre) se sont mis en place, et pas besoin de prêter des sentiments de supériorité à Kiki pour expliquer cette situation.

Mon chien a-t-il des sentiments ?



Mon chien a-t-il des sentiments ?

A proprement parler, le terme de « sentiments » n’est pas adapté pour les animaux.
Même si au quotidien il nous semble voir des preuves et des démonstrations que nos animaux de compagnie « fonctionnent » comme nous, cette idée est une mauvaise interprétation. En effet on prête souvent à nos chers animaux des sentiments humains tels que la jalousie, la vengeance,….voire même le racisme !!!





Or les sentiments peuvent être définis comme des états affectifs complexes liés à certaines émotions ou représentations. En clair, les sentiments sont l’apanage des très gros cerveaux des Hominidés. Ils naissent dans le néocortex, la partie la plus « récente » et évoluée de notre cerveau. Pour avoir des sentiments sensu stricto, il faut avoir conscience de Soi, ce qui est une caractéristique de la psychologie humain.
Est-ce à dire qu’il ne se passe rien dans le crâne de nos toutous ? Loin de là ! Car comme les humains, les animaux peuvent ressentir des émotions !

Les émotions sont des réactions intenses et fugaces à un changement de l’environnement qui va entraîner une réponse physique. Ce sont par exemple la peur (d’un bruit qui va entraîner la fuite), la colère qui va entraîner l’agression, la joie qui va entraîner….un câlin.
Pour résumer humains et animaux ont des émotions qui naissent dans leur cerveau « primitif », appelé système limbique. Mais seul l’homme va intégrer ces émotions dans son cerveau conscient supérieur pour générer des sentiments.


Alors ces exemples quotidiens de sentiment animal, comment les interpréter ? Tout simplement car les émotions et les apprentissages qui se sont construits autour (bien souvent à l’insu des maitres) vont permettre à l’animal de produire un comportement tout à fait similaire à un humain jaloux ou raciste… sans qu’il n’y ai là de sentiment à proprement parler !
On parle danthropomorphisme lorsque l’on prête des intentions (sentiments) humaines à des animaux.





Dr BOUVRESSE
Vétérinaire comportementaliste DENVF